Pierre, François, Auguste MORGAND

10/07/1921 Le Havre – 6/05/1945 Paris XIIIème

Élève lycée de garçons (1928-1936)

Résistant

Déporté

Mort pour la France


Pierre, François, Auguste Morgand, à gauche, et son père, lui-aussi prénommé Pierre.

Source : famille MORGAND

Pierre Morgand naît au Havre. Il est le petit-fils d'un négociant, exploitant forestier en Côte d'Ivoire, Pierre-François Morgand (1860-1940), maire du Havre de juin 1914 (il succède alors à Henry GÉNESTAL, démissionnaire pour raison de santé) à décembre 1919 (il est remplacé par Léon MEYER), donc pendant la difficile période de la première guerre mondiale. Il est le fils de Pierre, Maurice, Henri Morgand (1880-1955), cafetier, dont l'adresse est 24 place de l'Hôtel-de-Ville au Havre.

Il semble que, rapidement, Pierre Morgand ait perdu sa maman. Il vit au domicile paternel, en compagnie de son jeune frère André, né en 1923. Si on en croit sa « fiche élève », il intègre notre lycée le 1er octobre 1928 (tout comme son frère qui entre en classe enfantine), en provenance du lycée de filles, a priori en 10ème (CE1 ou 1ère année préparatoire). Il le quittera en 1936 après une 4ème. Il est externe libre et noté comme catholique. On trouve sa trace dans les palmarès de distribution des prix : en 1929, prix de Tableau d'honneur et 9ème accessit de leçon de choses ; en 1930, prix de Tableau d'honneur et 6ème accessit d'histoire-géographie ; en 1931, 9ème accessit d'histoire-géographie, 2ème accessit de lecture-récitation, 8ème accessit d'exercices physiques ; en 1932, un prix spécial, comme plusieurs autre élèves, de nature indéterminée. On sait qu'ensuite il travaillera dans le café de son père. Puis il aurait été employé, selon le Service Historique de la Défense et Brigitte GARIN, au service des sinistres à l'Hôtel de Ville du Havre, ou, selon André Morgand, à la Caisse d'Épargne.

En 1940, après la défaite, Pierre Morgand, cherche, avec quelques camarades qui, comme lui, pratiquent le ping-pong rue Cassard, à entrer dans la Résistance. Probablement à la suite de son père, qui en est un membre fondateur et chef trentainier du secteur Hôtel de Ville, il rejoint le « Groupement de Résistance générale » de Gérard MORPAIN. Il va bientôt, à l'automne 1940, y fonder sa propre formation de combat. C'est lui qui aurait été à l'origine du recrutement de Jacques HAMON et d'anciens élèves du Lycée de garçons et de l'École primaire supérieure. Il est par ailleurs chef de poste à la Défense passive.

Pour entraîner sa formation au combat, il a besoin d'armes et de munitions. Celles-ci sont notamment récupérées dans les casernes du boulevard de Strasbourg (caserne Éblé et caserne Kléber), ainsi que des explosifs sous les tribunes du HAC-Hockey à Bléville, et cachées en divers endroits, notamment au domicile de son père, place de l'Hôtel-de-Ville. Rapidement, Jacques Hamon devient responsable de l'organisation paramilitaire du groupe Morpain et nomme Pierre Morgand sous-chef de groupe.

Le 23 février 1941, les Morgand père et fils sont arrêtés dans une rafle. Ils restent emprisonnés pendant une huitaine de jours, à l'issue desquels ils sont relâchés, la perquisition place de l'Hôtel-de-Ville n'ayant rien donné. Notons qu'il semble qu'aucun des deux ne sera inquiété lors des opérations ayant mené, au printemps, à l'arrestation de Gérard Morpain et au démantèlement de son groupe.

En février 1942, Pierre Morgand, avec son groupe, rejoint « L'Heure H » nouvellement créée par Roger MAYER. Il sera bientôt affilié au réseau « Hamlet-Salesman-Buckmaster » en tant qu'agent P2 (agent régulier clandestin).

Le 17 ou le 22 novembre (selon les sources), il est arrêté sur son lieu de travail. Son père et lui sont interrogés par la Gestapo, dans le cadre d'une enquête sur un transport d'armes, après, selon sa famille, la dénonciation d'une femme qui sera condamnée après la guerre. Son père et lui sont relâchés.

Le 23, puis le 26 novembre 1942, Pierre Morgand est de nouveau arrêté, pour être incarcéré au Havre, dans la prison de la place Danton. Le 3 décembre, il est transféré au palais de Justice de Rouen pour suspicion de détention d'armes, avec ses camarades Henri MORVAN, Yves-Marie TANGUY, Joseph DRILLET et René GANDON. D'après Brigitte Garin, ils y sont soumis à la torture.

Puis Morgand, accompagné de Drillet et Gandon, est transféré en janvier 1943 au camp de Royallieu, à Compiègne (Oise). Le 17 ou le 24 janvier (selon les sources), ils sont déportés en train vers le « konzentrationslager » (KL) de Sachsenhausen, à une trentaine de kilomètres au nord de Berlin. Tout comme Joseph Drillet, Pierre Morgand est affecté au « Kommando Heinkel ». C'est le plus important des « Kommandos » extérieurs au camp, qui emploie en permanence 6 000 à 7 000 détenus. C'est le type même de l'usine – camp de concentration. 1 500 civils allemands encadrent les détenus. Des prisonniers de guerre travaillent dans les ateliers jusqu'en mai 1943, très soigneusement séparés des déportés. Cette usine d'aviation est située à quelques kilomètres d'Oranienburg – Sachsenhausen et comprend sept halls de fabrication de bombardiers. L'usine sera bombardée en avril 1944.

Le 7 juin 1944, Pierre Morgand est transféré au KL de Bergen-Belsen, en Basse-Saxe (nord-ouest de l'Allemagne), décrit comme un « camp mouroir », puis, le 29 juillet au KL de Buchenwald, en Thuringe. Enfin, le 4 septembre, il est envoyé au KL de Dora – Mittelbau, non loin de Nordhausen. C'est une dépendance de Buchenwald destinée au logement de déportés affectés à la fabrication de missiles balistiques V2, dans des tunnels résultant de l'exploitation du gypse, un site baptisé « Mittelwerk ».

Du 3 janvier au 1er février 1945, Pierre Morgand est hospitalisé au « Krankenrevier » (ou « revier »), un bâtiment du camp réservé aux prisonniers malades, pour une infection à la jambe. Le 4 avril 1945, devant l'avancée des troupes alliées, le camp est évacué et Pierre est renvoyé à Bergen-Belsen, où les troupes britanniques et canadiennes le libèrent le 15 avril.

Terriblement affaibli, il est alors rapatrié à Paris aux environs du 26 avril, via Lille. Il décède le 6 mai à l'hôpital de la Salpêtrière. Il n'avait pas encore 24 ans.

Il repose dans le caveau familial, au cimetière Sainte-Marie du Havre.

Il a été homologué FFI (« Forces françaises de l'intérieur ») et DIR (« Déportés et internés résistants »). Son nom est gravé sur notre monument aux morts et sur le monument « Résistance et Déportation » situé dans les jardins de l'Hôtel de Ville.

Il existe au Havre une rue Pierre-Morgand. D'après le dictionnaire historique des rues du Havre, elle semble toutefois vouloir rappeler le souvenir de l'ancien maire.

Sources :

https://www.havrais-en-resistance.fr/annuaire-de-la-resistance-havraise/entry/34094/?page_size=15&letter=m&gvid=20786&pagenum=18

https://www.havrais-en-resistance.fr/view/admin/entry/34095/

https://www.geneanet.org/registres/view/707456?individu_filter=1693799

Archives du lycée

Archives de l'Association

Dictionnaire historique des rues du Havre

Un merci tout particulier à Pierre Marcel Morgand, son neveu, fils de son frère André


Écrit par : Jean-Michel Cousin

Le 06/07/2025