LE LYCÉE PENDANT LA PREMIÈRE GUERRE MONDIALE


Dès le début des hostilités, en août 1914, le lycée est réquisitionné. La Croix-Rouge locale se prépare à recevoir des blessés et, pour épauler les hôpitaux et cliniques, aménage des hôpitaux de fortune dans des écoles, les lycées, des hôtels, les casinos, des immeubles, de vastes maisons particulières… 2 885 lits seront ainsi mis à la disposition des blessés. Ainsi, notre lycée, bientôt classifié HC8 (Hôpital complémentaire n°8), sous le contrôle du service de santé des Armées, propose 480 lits. Comme l’écrira Raymond QUENEAU, ancien élève de l’établissement : « Le lycée du Havre est un charmant édifice, on en fit en quatorze un très bel hôpital ».

Bientôt, le lycée sera réservé aux blessés de l’armée belge et sera dirigé, à partir du 19 mai 1916, par le Docteur SMETS. Les élèves, quant à eux, doivent migrer vers des locaux rue Lemaistre (première rue parallèle à la rue Ancelot vers l’ouest), vers l’Hôtel des Sociétés savantes, 56 rue Anatole-France (juste face à la rue Ancelot), et vers d’autres lieux encore... De nombreux professeurs sont absents, appelés sous les drapeaux, et le proviseur, F. BERSON, les remplace par des enseignants venus des régions envahies, par un professeur belge blessé sur l’Yser, par des professeurs du lycée de jeunes filles, par des professeurs-adjoints ou non-appelés par la mobilisation. Georges GONTHIER, professeur de Dessin de l’établissement, se fera momentanément maître de Mathématiques et d’Histoire Naturelle. Armand SALACROU rapportera plus tard qu’il avait eu alors comme professeurs « un aveugle, un poitrinaire et une vieille fille »...

Le lycée du Havre, hôpital pour l’armée belge.

Suite à la violente explosion de la Pyrotechnie belge, le 11 décembre 1915, c’est au lycée, dont des vitres ont été brisées, que seront amenées les dépouilles des nombreuses victimes (135 morts dont 101 militaires). Il s’agissait d’une entreprise de construction de matériel d’artillerie, installée sur la commune de Graville-Sainte-Honorine, boulevard Sadi-Carnot (notre boulevard Jules-Durand), n’employant que des Belges et qui avait localisé son activité la plus dangereuse (le remplissage des obus et un stock de 250 tonnes de poudre), dans un baraquement en bois, au bord du canal de Tancarville, surnommé l’Usine d’Or, là où des prospecteurs avaient tenté en vain, à la fin du XIXème siècle, d’exploiter des sables aurifères de la Seine. C’est au lycée, dans la cour d’Honneur, qu’on aurait apparemment tenté de reconstituer les corps mutilés avant de les mettre en bière. Une chapelle ardente sera installée au lycée, dans la cour couverte servant en temps de paix de gymnase (devenue le patio après la reconstruction de l’aile sud, où se situe aujourd’hui l’agora), dans l’attente des obsèques, le 14 ou le 15 décembre (selon les sources), en l’église Notre-Dame (pas encore, loin s’en faut, cathédrale du Havre).

Par ailleurs, pendant le conflit, la Belgique utilisera les locaux du lycée pour organiser, toujours dans la même cour couverte, diverses cérémonies, parfois agrémentées par la présence d’un orchestre.

Notre voisine d’Outre-Quiévrain (Quiévrain est une ville belge, francophone, en Wallonie, qui fut, jusqu’à la première guerre mondiale gare-frontière sur la ligne de chemin de fer Paris - Bruxelles) marquera également son intérêt pour l’administration et les élèves de notre lycée, exilés, nous le savons, dans d’autres lieux. C’est ainsi qu’on verra, par exemple, en juillet 1917, le général-major comte de GRUNNE, commandant supérieur territorial de l'armée belge au Havre depuis 1914, présider la cérémonie de distribution des prix de l’établissement, où étudient d’ailleurs quelques élèves belges, dont le futur général Henri VANVRECKOM.

La chapelle ardente des victimes de l’explosion de la Pyrotechnie belge, en décembre 1915.

Une cérémonie, le 16 juillet 1916.

Il faudra attendre avril 1919 pour que le lycée du Havre retrouve totalement ses élèves et sa vocation première.

Sources :


Écrit par : Jean-Michel Cousin

Le 11/08/2024