Florimond, Ferdinand, Jules LAURENT

28/07/1908 Le Havre – 27/02/1945 Nordhausen (Allemagne)

Élève lycée de garçons

Géomètre

Secrétaire au commissariat de police de Sanvic

Résistant

Déporté

Mort pour la France


Florimond Laurent naît au Havre. Nous savons qu'il va suivre au moins une partie de sa scolarité secondaire dans notre lycée, sans précision certaine. Il n'existe pas de fiche-élève à son nom, mais on le trouve, dans nos archives, au palmarès des distributions des prix : en 1922-1923, il suit une 4ème A (mention d'accessit en version latine et en dessin d'imitation), puis, en 1923-1924, une 3ème A (deuxième prix ex-æquo de grec, troisième prix ex-æquo de dessin d'imitation). Nous n'avons aucune trace de lui, ni avant, ni après, ce qui peut vouloir signifier soit qu'il n'a pas reçu de prix à l'issue d'autres classes, soit qu'il a fréquenté un ou d'autres établissements. Il a en tout cas obtenu, semble-t-il, un baccalauréat « Latin-sciences »

Il devient géomètre à la ville du Havre, puis secrétaire au commissariat de la police municipale à Sanvic. Il habite alors 78 rue de l'Orphelinat dans cette même commune. Il s'est marié en 1932 avec Marcelle PETIT et le couple a deux filles, Nicole, née en 1937, et Monique, née en 1938. Certaines sources en font le secrétaire général de la police du Havre.

Le 26 août 1939, Florimond Laurent est mobilisé dans le 2ème Groupe de reconnaissance des Corps d'Armée (GCRA). Il sera démobilisé le 30 juillet 1940, se voyant remettre la Croix de guerre.

De retour au Havre, il aurait appartenu au « Groupement de Résistance générale » de Gérard MORPAIN, avant d'être recruté, en janvier 1942, comme sous-chef du groupe trentainier de Sanvic de « L'Heure H » (dirigé par Henri MAGUIN), par Henri CHANDELIER, quincaillier devant l'église de Sanvic et adjoint de Roger MAYER à la tête du réseau. Dès juin 1942, il sera affilié au réseau « Hamlet-Salesman-Buckmaster » en tant qu'agent P2 (clandestin), agent de renseignement, sous-chef de groupe.

Florimond Laurent va se montrer très actif, sa profession lui permettant d'éditer de nombreux faux papiers, en particulier pour les réfractaires au STO (« Service du travail obligatoire »), mais aussi de prévenir les personnes recherchées par la police allemande. Il va également assurer la formation paramilitaire des hommes de son groupe.

Dénoncé par deux Français à qui il avait fourni des faux-papiers devant leur permettre de passer en Espagne, il est arrêté dans son bureau, devant ses collègues, le 18 mai 1943, pour « activité gaulliste, […] aide à passages en zone côtière interdite, entrave à recrutement de main-d'œuvre pour l'Allemagne en falsifiant des dates de naissance, emploi de faux cachets et fausses signatures pour des fiches de démobilisation ». Une perquisition à son domicile permet aux policiers allemands de découvrir des armes et des munitions. Il est enfermé dans les caves du palais de Justice de Rouen où il va rester jusqu'au 15 décembre 1943. Il parvient à correspondre avec son épouse, qui peut lui faire parvenir des colis, en écrivant des petits mots qui sont roulés et glissés dans les ceintures de ses sous-vêtements.

Du 16 au 23 décembre 1943, Florimond Laurent est incarcéré à la prison du Cherche-Midi, établissement militaire aujourd'hui disparu, qui était situé au 54 boulevard Raspail, à l'angle du 38 rue du Cherche-Midi, Paris VIème. Le 24 décembre, il est transféré au fort de Romainville, dans l'actuelle Seine-Saint-Denis. Le 6 janvier 1944, il est conduit à Paris, à la gare de l'Est. Avant d'embarquer dans un train dont il ignore la destination, il parvient à convaincre un policier de faire parvenir un courrier à son épouse. Plus tard, ayant sans doute obtenu des précisions, il griffonne quelques mots annonçant à sa femme son départ pour l'Allemagne, qu'il glisse dans une enveloppe et jette sur le quai. Elle parviendra à sa destinataire.

Florimond Laurent est déporté avec le statut « NN » (Nacht und nebel, nuit et brouillard) dans ce train qui part vers Strasbourg (Bas-Rhin). En application d'un décret du 7 décembre 1941, il est en effet possible de transférer en Allemagne les ressortissants des pays occidentaux occupés (France, Norvège, Pays-Bas, Belgique et Luxembourg) représentant « un danger pour la sécurité de l'armée allemande » (saboteurs, résistants, opposants ou réfractaires à la politique ou aux méthodes du Troisième Reich) et à terme, de les faire disparaître dans un secret absolu. Le 7 janvier 1944, il est acheminé au camp (KL) de Natzweiler-Struthof, le seul camp de concentration sur le territoire français.

Le 10 mars 1944, Florimond Laurent est envoyé au « Kommando Kochem » à Cochem, en Rhénanie-Palatinat, dans un camp annexe du Struthof, au bord de la Moselle. Trois cents détenus, des « NN » en majorité français, doivent y travailler dans une nouvelle usine souterraine. Les pertes sont tellement lourdes (25 morts en quatre semaines) que la décision est prise de renvoyer les prisonniers au Struthof, où Florimond Laurent arrive le 9 avril.

Le 19 avril 1944, il est transféré en Basse-Silésie (territoire de l'actuelle Pologne), à la prison de Wolhau (Wolów). Il doit en effet être jugé par le tribunal de Breslau (Wroclaw), en charge des déportés « NN » venus de France. Mais la procédure est très en retard et le statut de « NN » va bientôt, à la fin de l'été 1944, être abandonné et les déportés vont être renvoyés en camps de concentration. À cette époque, Florimond Laurent aurait réussi à s'évader, mais aurait été repris. En octobre 1944, il est transféré au KL de Groß Rosen, satellite du camp de Sachsenhausen.

L'Armée Rouge se faisant menaçante, les SS décident d'évacuer le camp, et les déportés arrivent le 11 février 1945 au KL de Dora-Mittelbau, près de Nordhausen (Thuringe). Le voyage, épouvantable, trois à cinq jours dans des wagons découverts, sans nourriture, dans la neige, cause la mort de 1 200 personnes dont certaines seront tuées à coups de pelles. Très probablement malade, Florimond Laurent doit entrer au « Revier » (abréviation de l'allemand Krankenrevier, le quartier des malades) le 16 février.

Il est déclaré décédé le 27 février 1945. Il avait 36 ans.

Son corps sera incinéré, ses cendres dispersées dans le charnier en contrebas du four crématoire du camp.

Décorations :

Ordre national de la Légion d'honneur, au grade de chevalier, à titre posthume (1950)

Médaille de la Résistance française, à titre posthume (1950)

Croix de guerre avec étoile de vermeil (citation à l'ordre de la division), à titre posthume (1947)

Croix de guerre avec étoile de bronze (citation à l'ordre du régiment) le 1er juillet 1940

Il a été homologué FFC (Forces françaises combattantes) et DIR (Déporté, interné, résistant). Il reçut un grade assimilé de sous-lieutenant, à titre posthume (1948). Il a été reconnu mort pour la France.

La partie sanvicaise de la rue de l'Orphelinat, où il habitait, deviendra en 1947 rue Florimond-Laurent, fait confirmé en 1959 après le rattachement de Sanvic au Havre. Son nom est, par ailleurs, inscrit sur le monument « Résistance et déportation », dans les jardins de l'Hôtel de Ville du Havre.


Écrit par : Jean-Michel Cousin

Le 06/07/2025