Jean LASNE
7/10/1911 Bolbec (Seine-Inférieure) – 16/05/1940 près d'Inor (Meuse)
Élève lycée de garçons (1924-1930)
Peintre
Mort pour la France

« Jean le Bleu » ou Petit autoportrait
Musée des Beaux-Arts de Rouen
Photo : Collection des Musées de France
Jean Lasne naît à Bolbec, dans une famille bourgeoise, au sein d'une fratrie de sept enfants. L'éducation y est très rigoriste. Le père, Désiré, est imprimeur, mais aussi propriétaire du journal « Le Progrès de Bolbec », et la famille vit 11 rue Gambetta. L'aîné des enfants, prénommé René, né en 1897, va initier très jeune au dessin son petit frère. Il fera d'ailleurs ensuite une carrière de peintre sous le pseudonyme de René GOUAST (le nom de jeune fille de sa mère) ; il publiera plus tard sous le nom de Gouast une anthologie de la poésie latine, et sous le nom de Lasne une anthologie de la poésie allemande.
Jean Lasne effectue sa scolarité primaire à Bolbec, passe ensuite semble-t-il, selon sa fiche-élève, au lycée de Rennes (Ille-et-Vilaine), puis il suit son frère, professeur (de dessin?) au Havre et intègre notre lycée en quatrième, le 1/10/1924. Il est catholique, demi-pensionnaire, et apprend l'anglais. René Lasne fréquente alors les peintres locaux ou de passage, et présente à son jeune frère Paul-Élie GERNEZ, qui vient souvent au Havre depuis Honfleur (Calvados). En 1928, alors qu'il n'a que 17 ans, Jean Lasne expose pour la première fois ses toiles dans une librairie de Rouen. Il voue alors une admiration particulière à l'œuvre de Paul CÉZANNE, mais aussi aux peintres cubistes. L'année 1929-1930 le voit suivre une terminale « Philosophie » et obtenir son baccalauréat. Il obtient un prix au Concours général de dessin en 1929. Il n'oublie toutefois pas Bolbec, sa ville natale, dont il peint notamment les ruelles et les usines avec chaleur et émotion.
Il quitte alors Le Havre pour Paris où il va préparer le concours pour devenir professeur de dessin. Parallèlement, il suit les cours de l'École des Beaux-Arts pour préparer le concours des Galeries des Beaux-Arts. Il échoue, mais entre dans l'atelier du peintre Lucien SIMON, toujours à l'École des Beaux-Arts, où il côtoie ceux qui deviendront ses amis : Georges ROHNER, Robert HUMBLOT, Henri JANNOT, Lucien FONTANAROSA, Jacques DESPIERRE et Colette BELEYS. Pour gagner sa vie, il est maître d'internat au lycée Jean-Baptiste-Say (Paris XVIème) et à l'École départementale de Vitry-sur-Seine (dans l'actuel Val-de-Marne), et y réalise de nombreux portraits d'élèves et d'enseignants. Ses tableaux sont alors représentatifs de l'art abstrait de son époque.
En août 1933, il accompagne Colette Beleys, devenue sa compagne, vers le sud de la France, à Cagnes-sur-Mer où ils visitent la maison d'Auguste RENOIR, à Aix-en-Provence sur les pas de Paul Cézanne, à Cassis… Cette même année 1933, le jeune couple expose au Salon des étudiants de la Grande Masse des Beaux-Arts, rue Saint-Jacques (Paris Vème), et obtient un certain succès critique.
En 1934, Colette Beleys et Jean Lasne s'installent dans un atelier de la cité Falguière (Paris XVème) et y fréquentent Amedeo MODIGLIANI, Chaïm SOUTINE, Tsugouharu FOUJITA et Paul GAUGUIN qui y ont établi leurs quartiers. C'est également l'heure du service militaire pour Jean Lasne, qu'il effectue à Orly (actuel Val-de-Marne). Cette même année, c'est dans une galerie parisienne que Jean expose pour la première fois, à la galerie Carmine, avec ses camarades de l'atelier Simon.
Avril 1935 : Jean Lasne participe à la première exposition du groupe Forces Nouvelles à la Galerie de Joseph BILLIET et Pierre VORMS, rue La Boétie (Paris VIIIème). Le second nommé fait circuler les toiles dans divers pays (Pays-Bas, Angleterre, Belgique, Tunisie, Australie). En décembre 1935, Jean Lasne épouse Colette Beleys, et ils s'installent peu après dans un atelier rue Huygens (Paris XIVème).
1936 : Jean Lasne est lauréat du « Prix de Rome en liberté », réunissant cinquante-huit peintres de moins de trente ans et dont le jury est présidé par Henri MATISSE. Après une exposition à la galerie Charpentier, Colette et Jean parcourent l'Italie avant une nouvelle exposition à la galerie Billiet-Vorms.
La carrière de Jean Lasne est à présent bien lancée. Il aborde les décors et les costumes de théâtre, notamment pour la pièce « Atlas Hôtel » de notre camarade Armand SALACROU. Il peint plusieurs toiles inspirées des massacres de la guerre d'Espagne (1937), participe à de nombreuses expositions, se rapproche de Francis GRUBER, Jean BAZAINE, Alfred MANNESSIER, André MARCHAND, Charles LAPICQUE. Il réalise également une quinzaine de sculptures. En 1939, Georges HUISMAN, directeur général des Beaux-Arts, commande à Jean Lasne une fresque pour décorer la piscine municipale du Havre, cours de la République, le sculpteur Alphonse SALADIN étant chargé de réaliser deux bronzes monumentaux. Le projet est interrompu par la déclaration de guerre au mois de septembre, et il n'en subsiste qu'une esquisse gouachée, « Les nus mythologiques pour la piscine du Havre ».
Jean Lasne est mobilisé dans le 36ème régiment d'Infanterie. Il sera tué le 16 mai 1940, près de Sedan (Ardennes), lors de la percée allemande et inhumé à Inor. Il avait 28 ans.
En 1941, ses amis peintres lui rendent un hommage posthume lors d'une exposition considérée comme un des actes de résistance à la notion d'« Art dégénéré » (Entartete Kunst) prônée depuis 1937 par les Nazis pour interdire toute forme d'expression liée à l'Art moderne. Cette exposition, intitulée « Vingt jeunes peintres de tradition française », regroupe des œuvres de Jean Bazaine, Édouard PIGNON, Alfred Manessier, Pierre TAL COAT, et quelques œuvres de Jean Lasne. Celui-ci tombera malgré tout dans l'oubli pendant une petite cinquantaine d'années jusqu'à ce que, dans les années 1980, ses toiles sortent de l'ombre grâce à l'action de sa veuve Colette et ne fassent l'objet de nombreuses expositions. On peut aujourd'hui trouver des toiles de Jean Lasne dans de nombreux musées (dont le musée André-Malraux du Havre), la principale collection étant celle du musée des Beaux-Arts de Rouen.
Le nom de Jean Lasne est gravé sur notre monument aux Morts.


Une rue de Bolbec.

Nature morte. Centre Pompidou. Paris.
Sources :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean_Lasne
https://gghsm.forumpro.fr/t11459-jean-lasne-peintre-oublie
https://pop.culture.gouv.fr/notice/joconde/07290005857
Archives du lycée
Archives de l'Association (Fiche par Bertrand Vittecoq)
Écrit par : Jean-Michel Cousin
Le 06/07/2025