Pierre, Marie, Félix JANET


30/05/1859 Paris – 27/02/1947 Paris
Professeur de philosophie lycée de garçons (sept ans autour de 1884)
Médecin – Précurseur de la psychiatrie


Photographie de Paul CARDON, dit DORNAC

Pierre Janet est le fils de Jules Janet et de son épouse, Fanny HUMMEL, d’origine allemande. La famille Janet compte dans ses rangs plusieurs personnalités : Louis (libraire et auteur), Gustave et Ange-Louis, dit Janet-Lange (célèbres graveurs), Paul (oncle de Pierre, célèbre philosophe du spiritualisme fondé par Victor COUSIN, qui va marquer la jeunesse de son neveu), un autre Paul (physicien, cousin de Pierre, qui sera directeur de l’École Supérieure d’Électricité dite « Supélec », fondée en 1894).

Pierre Janet passe son enfance à Bourg-la-Reine, aujourd’hui dans les Hauts-de-Seine. Il habite dans une grande maison de style Renaissance, avec un grand jardin où il va développer sa première passion, qu’il conservera toute sa vie, la botanique. Il fréquente le collège Sainte-Barbe-des-Champs dans l’ancien château de la proche commune de Fontenay-aux-Roses, puis le lycée Sainte-Barbe de Paris, sur la montagne Sainte-Geneviève (dont le collège était une annexe). Il traverse à l’adolescence une grave crise morale, où il perd ses convictions religieuses et commence à se passionner pour la psychologie, qui est à l’époque une spécialité de la philosophie, voie qu’il choisit pour ses études. Il accède, en 1879, à l’École Normale Supérieure de la rue d’Ulm. Il s’y lie d’amitié avec Henri BERGSON et obtient en 1882 l’agrégation de philosophie.

Il va commencer une carrière d’enseignant, passant par Châteauroux, Le Havre (il y fera en 1884 le discours de la distribution des prix) et les lycées parisiens Louis-le-Grand et Condorcet, puis la Sorbonne après 1896. Il est noté qu’il aurait commencé, pendant son séjour au Havre, à s’occuper bénévolement des aliénés. Il s’intéresse à l’« Automatisme », c’est à dire les actes effectués par le sujet sans qu’il s’en aperçoive, ce qui est pour lui « une forme rudimentaire de la conscience où l’activité, la sensibilité et l’intelligence se confondent absolument ».

En 1889, il devient docteur en philosophie (thèse sur « L’automatisme psychologique. Essai sur les formes inférieures de la conscience » qui remet en question les vieilles conceptions sur la volonté, le moi, l’inconscient, les sentiments… et pose les premières lois de la « Psychologie dynamique » par opposition à la psychologie historique, celle des philosophes), il deviendra en 1893 docteur en médecine (thèse : « Contribution à l’étude des accidents mentaux chez les hystériques »). En 1894, il publiera un « Manuel du baccalauréat » de philosophie qu’il remaniera jusqu’en 1923. Cette même année 1894, il épouse Marguerite DUCHESNE, qui lui donnera trois enfants.

Mais, dès 1889, le célèbre neurologue Jean-Martin CHARCOT, qui a lui-même effectué des travaux sur l’hypnose et l’hystérie, qui a été impressionné par la thèse de philosophie d’un jeune homme qui n’a pas 30 ans et n’est même pas encore médecin, lui confie la direction du laboratoire de psychologie de l’hôpital de la Salpêtrière, confiance qui lui sera renouvelée, en 1894, après la mort du Professeur Charcot l’année précédente, par son successeur, le Professeur Fulgence RAYMOND. Les médecins commencent à cette époque à s’intéresser à la psychologie qui va devenir partie prenante de la neurologie (on ne parle pas encore de psychiatrie à cette époque). Il va conserver ce poste jusqu’en 1910 et la « fermeture malheureuse » du laboratoire par le Professeur Jules DEJERINE lorsqu’il devient chef du service de neurologie.

Le 29 mars 1901, Pierre Janet fonde ce qui deviendra la Société française de psychologie, toujours en activité. En 1904, il crée le « Journal de psychologie normale et pathologique ». Mais, dès 1902, il a succédé à Théodule RIBOT à la chaire de Psychologie expérimentale et comparée du Collège de France.

Jusqu’aux années 1920, Pierre Janet, qui est invité dans le monde entier à donner des cours et des conférences, va déployer deux activités principales :

- l’étude expérimentale des pathologies mentales, qui va le conduire à publier de nombreux articles de recherche et de livres, traduits en plusieurs langues,

- ses cours au Collège de France. Son enseignement y est suivi par un nombreux public qui, souvent plus mondain que scientifique, est attiré par son talent d'orateur éclectique, toujours porté à de brillantes généralisations philosophiques.

En 1923, il est reçu à l’« Institut de France » et devient, en 1929, président de la « Société médico-psychologique », où il avait été admis dès 1894, une société toujours active.

En 1934, alors qu’il a 75 ans, il cesse ses interventions au Collège de France, mais va continuer à publier des articles de recherche dans diverses revues internationales (il en publiera plus de 120, en plus d’une trentaine de livres), à recevoir des patients, à participer à des colloques. Sa méthode d’examen recourt à l’hypnose sur des sujets reçus dans un cadre psychiatrique et c’est pourquoi, en plus de ses recherches psychologiques, il va publier de nombreux travaux sur la psychopathologie et, paradoxalement, c’est cette partie psychiatrique de son œuvre qui est actuellement la plus connue et la plus utilisée, tandis que la partie purement psychologique semble sous-exploitée.

Il travaille également à une synthèse sur la hiérarchie des types de croyances et leur développement dans l’histoire sous les formes de la religion, de la philosophie et de la science, une œuvre qui restera inachevée.

Victime d’une infection pulmonaire, Pierre Janet meurt à l’âge de 88 ans. Il est enterré près des siens, à Bourg-la-Reine. S’il meurt couvert d'honneurs, il est assez isolé des courants universitaire et scientifique de la psychologie pathologique, qui est alors dominée par la psychophysiologie pavlovienne et par la psychanalyse.

L’hôpital psychiatrique du Havre porte son nom, de même que l’hôpital en santé mentale de l’Oulaouais, dans le Grand Montréal, au Canada.


Écrit par : Jean-Michel Cousin

Le 11/09/2022