Jules LEMAÎTRE


de naissance François, Élie, Jules Lemaître
27/04/1853 Vennecy (Loiret) – 4/03/1914 Tavers (Loiret)
Professeur lycée du Havre (1875-1880)
Professeur d’Université
Écrivain-critique littéraire
Membre de l’Académie française


Photographie : Wikipédia

Né dans le Val de Loire, Jules Lemaître est lauréat du Concours général en 1870. En 1872, il entre à l’École Normale Supérieure dont il ressort en 1875 avec une agrégation de lettres.

Il semble arriver au Havre dès 1875, apparemment son premier et dernier poste dans un lycée, pour être professeur de la classe de Rhétorique, ainsi qu’on nommait alors la classe de première littéraire (et ainsi qu’on l’appelle encore en Belgique). En plus de ses cours rue Ancelot, Jules Lemaître enseigne la littérature aux demoiselles de la pension GYSELINK, rue d’Éprémesnil, ainsi qu’à l’École supérieure de jeunes filles, rue de Joinville (rue Henry Génestal après 1918). Par ailleurs, il donne des conférences au cercle Franklin à la demande de la Ligue de l’enseignement, et à l’Hôtel de Ville à celle de la municipalité.

De la ville, il a une opinion un peu mitigée : « C’est presque Paris, plus la mer », mais il ajoute : « Tout est cher ici ». Il écrira encore sur certains Havrais : « Les épiciers millionnaires ne voient guère que les millionnaires épiciers »... Notons encore quelques vers extraits des « Médaillons » :

« Et des jardins de Frascati
La brise m’apporte, amollie,
Un couplet de Donizetti
D’une ardente mélancolie ».

Dans son discours prononcé à l’occasion de la distribution des prix de juillet 1876, il conseille aux élèves : « Montez jusqu’à la Hève pour écouter cet hymne sourd formé de millions de notes qui ont fait des milliers de lieues pour venir mourir aux colères sous vos pieds ». Enfin, au moment de quitter Le Havre, il écrira à ses parents : « Je ne regretterai que M. METZÉ (son collègue professeur d’anglais), la brasserie et les bouillis de la mère MORIN ».

En 1880, il est nommé maître de conférences à l’École supérieure des Lettres d’Alger. En 1882, il devient chargé du cours de littérature française à la Faculté des Lettres de Besançon, puis professeur à celle de Grenoble de 1883 à 1884. En 1882, il est devenu, à la Sorbonne, docteur ès lettres en soutenant une thèse sur « La Comédie après Molière et le théâtre de Dancourt ».

Mais déjà il collabore à la « Revue bleue » et au « Temps », et devient critique dramatique au « Journal des Débats ». Il va rapidement décider de ne plus vivre que de sa plume et démissionne de l’enseignement en 1884. Il va bientôt publier plusieurs pièces de théâtre, des contes, des essais, des nouvelles, des poésies et un roman.

Dans cette première moitié des années 1880, Jules Lemaître fait la connaissance de la comtesse de LOYNES. Née à Reims en 1837, Marie-Anne DETOURBAY, enfant naturel ayant travaillé à rincer les bouteilles pour une célèbre firme de champagne, est montée à Paris dès ses seize ans, « enlevée par un acteur de passage » (Wikipedia) et y devient courtisane. Elle aura plusieurs protecteurs, certains célèbres, comme le prince Napoléon, dit « Plon-Plon » (fils de Jérôme, le plus jeune frère de Napoléon 1er), qui l’installe luxueusement rue de l’Arcade et lui permet de tenir salon avec des célébrités du second empire : Ernest RENAN, Théophile GAUTIER, Gustave FLAUBERT… En 1872, elle épouse le comte Victor Edgar de Loynes. Cette union ne durera pas, mais elle conservera l’usage du titre de comtesse et va s’installer encore plus luxueusement, sur les Champs-Élysées, où elle va recevoir les célébrités de la troisième république naissante : Georges CLEMENCEAU, Alexandre DUMAS fils, Maurice BARRÈS, Marcel PROUST… Lorsque Jules Lemaître rencontre cette demi-mondaine, il a quinze ans de moins qu’elle. Ce sera pourtant la femme de sa vie, et lui va devenir l’instrument de son ambition politique.

Il continue bien sûr à écrire, ce qui va lui valoir, le 20 juin 1895, d’être admis à l’Académie française au fauteuil de Victor DURUY où il sera reçu par Octave GRÉARD.

Sous l’impulsion du poète François COPPÉE et de Madame de Loynes, Jules Lemaître fonde en 1899, la « Ligue de la Patrie française », dont il devient le premier président, et qui compte dans ses rangs Edgar DEGAS, Auguste RENOIR, Jules VERNE, José-Marie de HEREDIA. La Ligue prône le nationalisme et devient anti-dreyfusarde, ce qui provoque une rupture avec Georges Clemenceau et Anatole FRANCE. Lemaître prononce de nombreux discours, collabore à « L’Écho de Paris », et finit par démissionner de la Ligue en 1904, ce qui signe sa disparition. Peu avant sa mort en 1908, Madame de Loynes aide financièrement Charles MAURRAS et Léon DAUDET à développer « L’Action française » dont Jules Lemaître devient membre.

Il meurt à l’âge de 61 ans et est inhumé au cimetière de Tavers.

Il était décoré :

  • de la Légion d’honneur avec le grade d’officier.

Une rue du XIIème arrondissement de Paris porte son nom depuis 1926.

« Les œuvres poétiques de M. Jules Lemaître passèrent à peu près inaperçues à leur parution et sont oubliées aujourd'hui ; ses romans, non plus, n'ont jamais fait grand bruit et ses pièces de théâtre, toujours accueillies favorablement cependant, ont rarement atteint le succès ; mais ses travaux de critique littéraire et dramatique ont établi sa réputation. Écrivain plein de verve, il déploie, en ses analyses, toutes les ressources d'un esprit brillant et d'un style abondant ; il amuse le lecteur et le charme souvent, mais il arrive rarement à le convaincre ; jouant toujours avec les idées, s'abandonnant à tous les caprices de sa fantaisie et évitant d'émettre des opinions trop absolues, il semble n'attacher lui-même qu'une minime importance à ses jugements. « C'est un fantaisiste qui s'amuse, » (Gustave Lanson).

Merci à Gérard VOGEL


Écrit par : Jean-Michel Cousin

Le 26/09/2022